Qui sont les milléniaux ? Comment influent-ils sur le marché de l’art ? Comment les entreprises font-elles venir artistes et œuvres d’art dans leurs murs ? Pourquoi sont-elles intéressées ? Voici quelques-unes des questions abordées pendant The Art market day, une journée d’échanges pour les professionnels de l’art. Je vous en livre un résumé, comme si vous y étiez !
- Conférence : comment millenials et génération Z bouleversent le marché.
- Désir d'indépendance
- De qui parle-t-on ?
- Transparence et empathie
- Un marché à réinventer !
- Conférence : l’art dans l’entreprise, une manne pour le marché ?
- Des dispositifs financiers pour les entreprises
- La réduction d'impôt sur l'achat des œuvres d'art, kezako ?
- L'art dans l'entreprise : quels avantages ?
Le mardi 6 décembre 2022, s’est tenu à Beaubourg The Art market day, une journée de conférences réservées aux professionnels organisée par le Quotidien de l’Art. Son objectif : réfléchir aux mutations du marché. J’ai pu y assister en tant que journaliste. Deux conférences m’ont particulièrement intéressée : celle sur l’influence des jeunes générations sur le marché de l’art, et une autre sur les relations art-entreprises.
Conférence : comment millenials et génération Z bouleversent le marché.
Animée par Alison Moss, journaliste au Quotidien de l’Art, cette conférence réunissait Everette Taylor, PDG de la plateforme de crowdfunding Kickstarter et Emmanuel Tibloux, directeur de l’EnsAD (l’école des Arts Déco de Paris).
Voici les points clés :
Désir d’indépendance
Les jeunes artistes, même s’ils ne renoncent pas au marché de l’art, craignent que ce marché n’uniformise leur pratique. Ils ont la tentation de se mettre en retrait et court-circuitent souvent les intermédiaires (galeries, salons) pour s’autodiffuser.
Ces jeunes artistes se veulent plus autonomes que leurs aînés, ils ne se sentent pas liés à une seule galerie. Ils peuvent avoir plusieurs contrats, déposer des créations dans une galerie et d’autres ailleurs. Et même s’ils ont une galerie, ils peuvent produire certaines de leurs propres expositions.
De qui parle-t-on ?
Les millenials ou milléniaux (appelés aussi génération Y) regroupent les personnes nées entre le début des années 1980 et la fin des années 1990.
La génération Z (ou Gen Z) concerne, quant à elle, les personnes nées entre la fin des années 90 et la fin des années 2010.
Transparence et empathie
La jeune génération, que ce soit du côté des acheteurs ou des artistes, veut plus de transparence dans le marché de l’art. Le prix des œuvres doit être visible, la façon d’acheter doit être simple et facile, « sans chichi ». Les artistes veulent savoir qui les achète et combien.
De nombreux jeunes artistes affirment “on se la joue comme PNL” (le groupe de rap qui a connu le succès en s’autoproduisant)
Avec le désir de transparence, l’autre caractéristique des milléniaux et des gen Z, c’est l’empathie. Les jeunes générations veulent des relations plus directes, voire quasi amicales, entre artistes et collectionneurs. Les réseaux sociaux sont un de leur moyen de contact favori, car ils permettent cette mise en relation directe. Ils sont très sensibles à l’injustice sociale. Les jeunes générations ont des attentes fortes sur les conditions et les relations de travail. Elles ne supportent pas la mauvaise façon dont parfois le monde de l’art traite ses employés dans les galeries ou les établissements culturels.
Un marché à réinventer !
Fort de ce constat, le marché de l’art doit se réinventer et prendre en compte ces exigences de transparence, de sincérité et d’empathie. Il faut proposer aux jeunes artistes des expériences et des espaces de ventes innovants, où la relation avec le public et les acheteurs se fait plus directement. Pendant la conférence, le Consulat Voltaire à Paris est ainsi cité en exemple. C’est un tiers lieu qui combine espace d’expositions, performances, concerts, atelier d’artistes, conférences, restaurant et bar…
C’est archaïque de penser que les artistes ont toujours besoin d’une galerie.
Conférence : l’art dans l’entreprise, une manne pour le marché ?
(ne pas oublier le point d’interrogation 😉 )
Animée par Armelle Malvoisin, journaliste et commissaire d’expositions, cette autre conférence réunissait Édouard Challemel du Rozier, fondateur de Bail Art (leasing d’œuvres d’art), Claire Gastaud galeriste, Philippe Lamy, fondateur de Barter (société de conseil en acquisition d’art), et Fabien Vallérian, directeur art et culture de la Maison Ruinart (champagne)
Les points à retenir
Des dispositifs financiers pour les entreprises
Les entreprises font entrer l’art dans leurs murs principalement par deux dispositifs : la réduction d’impôt sur l’achat des œuvres d’art et la location avec option d’achat des œuvres.
La défiscalisation
Le dispositif de réduction d’impôt sur l’achat d’œuvres d’art est en sursis, il devait s’arrêter à la fin de l’année 2022 et vient d’être prolongé de trois ans par le projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Mais que se passera-t-il après ce nouveau délai ?
La réduction d’impôt sur l’achat des œuvres d’art, kezako ?
Peuvent en bénéficier les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, les sociétés et entrepreneurs individuels soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des BIC pour l’achat d’œuvres originales et entièrement exécutées de la main de l’artiste. Ce dernier doit être encore vivant au moment de l’achat et l’œuvre doit être exposée dans les locaux de l’entreprise à la vue du public ou des salariés.
Si toutes ces conditions sont réunies, l’entreprise peut effectuer une déduction fiscale, étalée sur 5 ans (année de l’acquisition et les 4 années suivantes) par fractions égales. Les sommes sont déductibles dans la limite de 20 000 € ou 5 ‰ du chiffre d’affaires hors taxe de l’entreprise.
Plus d’infos sur le site entreprendre.service-public
La location
La location avec option d’achat (LOA), ou leasing, est un dispositif plus simple. Elle permet aux entreprises de louer une œuvre pour l’aménagement de leurs espaces professionnels, tout en bénéficiant d’une solution de financement avantageuse.
Les loyers de la location sont 100 % déductibles. Les charges locatives peuvent être étalées de 13 à 48 mois. En fin de location, l’œuvre peut être acquise à sa valeur résiduelle…
Les avantages du leasing par rapport à la réduction d’impôt, c’est que l’entreprise peut choisir des œuvres d’artistes décédés. Elle n’est pas limitée financièrement dans ses achats et a moins d’obligations comptables. Elle peut changer régulièrement la décoration de ses locaux puisque les œuvres sont louées.
Une remarque générale, les entreprises qui font appel à ces dispositifs ont un dirigeant qui manifeste une appétence particulière pour l’art, c’est lui le levier déclencheur.
L’art enrichit l’ADN de l’entreprise
L’art dans l’entreprise : quels avantages ?
Faire entrer l’art dans l’entreprise offre de nombreux avantages autres que financiers :
- Cela participe à l’image de marque de l’entreprise
- L’exposition des œuvres suscite la curiosité. Elle crée du lien, des échanges entre les employés. Ils s’ouvrent au monde de l’art.
- Dans cette période de télétravail, l’art peut redonner aux salariés l’envie de revenir au bureau
- Pour l’artiste, c’est une source de revenus supplémentaires, de nouveaux collectionneurs.
L’art en entreprise peut prendre différentes formes. Il peut s’agir d’accueillir l’artiste en résidence comme le propose Ruinart. Il y a alors des échanges très enrichissants avec le personnel. Cela crée des disruptions, des nouveaux regards sur leur mode de travail, leur environnement professionnel.
Bonne nouvelle, ce ne sont pas uniquement les artistes connus qui intéressent les entreprises. Selon le comité des galeries d’art, 75 % des œuvres d’art vendues aux entreprises ont un prix inférieur à 5 000 euros.
En conclusion, les entreprises sont sensibles aux aides financières, mais ce n’est pas leur seul moteur de décision. Il est important que la défiscalisation des œuvres d’art perdure. Mais les politiques méconnaissent la réalité du marché, ils pensent que c’est une niche fiscale inutile alors que cette mesure aide vraiment les artistes et les galeries qui la proposent.
L’AUTEURE
Valérie Auriel
Artiste peintre et journaliste, Valérie est une grande curieuse, assez perfectionniste (limite maniaque 😉 ). Elle met en synergie ses deux expériences professionnelles pour débroussailler la jungle administrative des métiers des arts visuels, explorer leurs coulisses. Et elle partage avec vous ses connaissances pour que vous exerciez votre art en toute sérénité !