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Comment trouver une galerie ?

Exposer en galerie est un idéal pour de nombreux artistes. Mais il s’agit d’une quête ardue pour celui ou celle qui la poursuit, car il y a peu de galeries d’art et beaucoup d’artistes ! Voici quelques conseils pour mettre toutes les chances de votre côté et trouver le galeriste de vos rêves ! 😉


Selon un rapport un peu ancien du ministère de la Culture, la France dénombre plus de 2 000 galeries d’art contemporain, dont 53 % sont situées en Île-de-France. Comme il y a entre 60 000 et 100 000 artistes des arts visuels, on comprend alors la difficulté d’exposer dans de tels lieux. Toutefois, même si l’enjeu est de taille, il n’est pas interdit d’essayer (et de réussir). « Fais de ta vie un rêve, et d’un rêve, une réalité », disait ainsi Antoine de Saint-Exupéry. Cependant, ne vous tirez pas une balle dans le pied en démarchant n’importe comment !

Les galeries d’art : portrait rapide

Avant de contacter une galerie d’art*, le préalable est de bien comprendre son mode de fonctionnement. La majorité d’entre elles sont des toutes petites structures (avec un ou zéro salarié). Leur dirigeant est souvent un passionné qui effectue une sélection selon ses coups de cœur et/ou une thématique particulière. Certains lieux sont ainsi spécialisés dans l’art brut (galerie Christian Berst, galerie Polysémie), la photo (galerie XII), le street art (galerie Itinerrance), etc.

Une galerie organise à la fois des expositions personnelles dédiées à un seul artiste et des événements collectifs. Elle peut alors y présenter de nouvelles recrues qu’elle teste auprès de son public. Une exposition dure en général un mois. Chacun de ses artistes peut se voir programmer une exposition personnelle tous les deux ou trois ans, voir tous les ans. Une galerie sérieuse ne fonctionne ainsi qu’avec un nombre limité d’artistes : une vingtaine, une trentaine… Les expositions sont financées par la galerie. En contrepartie, celle-ci perçoit une commission sur les ventes (50 % habituellement). Si l’artiste ne vend rien, elle perd de l’argent. S’il vend beaucoup ou cher, c’est une opération rentable. Quant à l’artiste exposé, il n’est rémunéré que sur ses ventes. Si autrefois, certaines galeries versaient un salaire mensuel à leurs meilleurs talents en échange d’une exclusivité ou d’œuvres, ce système n’existe plus à ma connaissance.

Comme les galeries ne sélectionnent qu’un nombre limité d’artistes, vous comprenez pourquoi il est très compliqué pour un débutant d’y exposer. Il est donc contreproductif de contacter une galerie sans avoir réfléchi à votre stratégie (même si on trouve sans doute des contre-exemples d’artistes ayant réussi au culot).  

Véritable galerie d’art ou loueur de cimaises ?

Quand un artiste commence à montrer son travail dans des salons ou lors de portes ouvertes par exemple, il est fréquemment sollicité par de prétendues galeries, parfois internationales (hum), qui ne rêvent que de l’exposer. Mais souvent, les désillusions sont au bout de l’aventure.

Il existe en effet un certain nombre de lieux qui s’intitulent galeries d’art, mais qui ne sont que des loueurs de cimaises. Le principe est de mettre à la disposition de l’artiste leur local ou une partie de leurs murs. Mais ce service n’est pas gratuit, même si on ne vous le dit pas tout de suite : il faut louer l’emplacement. Parfois, en plus du prix de location, un pourcentage sur les ventes est prélevé, ainsi que des frais de vernissage, d’impression de catalogue (etc.) Le loueur de cimaises ne prend aucun risque financier puisque l’artiste a payé pour exposer. Il n’y a pas de curation, mais une sélection par qui peut, qui veut payer.

Méfiance donc si une galerie vous propose d’exposer sans avoir vu physiquement votre travail et sans vous avoir rencontré. Un vrai professionnel va toujours s’intéresser à votre parcours d’artiste, il voudra visiter votre atelier. Il est rare qu’il organise tout de suite une exposition personnelle. Et surtout il supportera seul le risque financier s’il croit en votre travail. Il ne vous demande pas d’argent pour exposer. Méfiance également aux trop beaux discours, aux promesses merveilleuses (qui n’engagent que ceux qui les écoutent). Ils n’ont pour but que de mieux vous ferrer.

Contacter une galerie : mode d’emploi

Inutile tout d’abord de vous adresser aux grosses galeries internationales (comme Karsten Grève ou Thaddaeus Ropac) qui ne fonctionnent qu’avec des superstars de l’art contemporain. C’est une perte de temps et d’énergie.

Vous devez viser de préférence de jeunes galeries qui n’ont pas fait encore le « plein » d’artistes, des galeries locales plus ouvertes à de nouvelles collaborations. La première chose à entreprendre est de visiter les galeries de votre région. Pour vous éviter de vous déplacer pour rien, regardez leur site internet et choisissez celles ayant une programmation proche de votre art. Consultez aussi le Guide des galeries édité par le magazine Artension, dont la sixième édition est en préparation. Il recense près de 700 établissements avec leur principale orientation.

Une page du Guide des Galeries édité par le magazine Artension

Lors de votre première visite, comportez-vous comme un client classique, tout en notant l’accueil, le bon emplacement de la galerie, l’état des lieux, la présentation des œuvres, etc. N’hésitez pas à poser des questions, à vous intéresser sincèrement aux œuvres. Vous serez bien reçu. Ne vous fiez pas à l’atmosphère souvent un peu intimidante de ces lieux (et si vous êtes mal accueilli, inutile de songer à leur confier votre travail). À contrario, il est très désagréable pour un galeriste de voir débarquer un artiste, carton à dessins sous le bras, qui les sollicite sans avoir pris rendez-vous et sans porter un seul regard sur les cimaises.

Si vous appréciez la programmation de la galerie, n’hésitez pas à vous rendre à ses expositions et vernissages. Instaurez une relation de plus en plus personnelle avec le galeriste. Lors de ces échanges, vous pouvez bien sûr dire que vous êtes artiste. Si votre interlocuteur marque son intérêt, proposez d’envoyer par e-mail un dossier de votre travail, ou de présenter quelques œuvres en direct lors d’un rendez-vous. Quand vous envoyez votre book par e-mail, soyez bref et précis. Adressez-vous au galeriste par son nom (ce n’est pas un mail type posté à toutes les galeries de la place). Expliquez en quelques lignes pourquoi vous le contactez, quel est votre profil artistique, et ce que vous lui proposez. Joignez des images de très bonne qualité de vos œuvres, mais pas trop lourdes. N’oubliez pas vos coordonnées. Une ou deux semaines plus tard, sollicitez une entrevue. Si vous essuyez un refus, n’insistez pas, mais ne coupez pas tout contact avec le galeriste. Continuez à visiter ses expositions. Tenez-le informé de votre actualité artistique.

Avez-vous pensé à Instagram et à vos cercles d’amis ?

Une autre voie à ne pas négliger pour trouver une galerie est la cooptation. Les relations artistes-galeristes sont basées sur une confiance mutuelle. Quand un artiste présente à son marchand le travail d’un confrère, il est souvent écouté avec attention. D’où l’importance de ne pas rester isolé. Il faut penser réseaux, participer à des événements collectifs (comme des portes ouvertes, des interventions dans des espaces publics). Faites-vous connaître de vos pairs, créez des liens d’amitié. Les rencontres déboucheront sur de nouvelles rencontres. Tout ce travail portera ses fruits, à condition d’être patient et persévérant.

Misez aussi sur les réseaux sociaux, et plus particulièrement sur Instagram. De très nombreux galeristes y font du repérage. Ils font jouer le hasard des algorithmes ou effectuent des recherches à partir de leurs cercles de collectionneurs, d’artistes… De votre côté, vous pouvez aussi y chercher des galeries adaptées à votre art. Vous vous manifestez auprès d’elles en likant, commentant et partageant régulièrement leurs posts dans vos stories. Cet intérêt pour leur programmation déclenchera le leur…

* Je parle ici des galeries d’art qui font un vrai travail de sélection et non des galeries loueuses de cimaises, qui n’ont pas les mêmes problématiques. (voir encadré)


POINT DE VUE DE GALERISTE

« La relation artiste-galerie est une alchimie »

Photo Fredrik Erichsen

Cécile Dufay, galeriste

Créatrice de la galerie éponyme Cécile Dufay.

Auparavant, elle a soutenu les artistes femmes avec la galerie Dufay/Bonnet, après avoir promu en duo la jeune scène française avec la galerie Edgar le marchand d’art. Elle a été ensuite commissaire d’exposition.

https://galeriececiledufay.fr/

La galerie se trouve au cœur du Villlage Suisse à Paris, un lieu regroupant galeries d’art et antiquaires.

Le Guide de l’artiste : Pouvez-vous décrire votre galerie ?

Cécile Dufay : J’ai créé ma galerie d’art contemporain en avril 2021, en plein confinement ! C’est le premier lieu que je dirige en solo, mais auparavant, je me suis occupée de plusieurs espaces et j’ai été commissaire d’expositions. Cette nouvelle galerie se situe au cœur du Village Suisse à Paris, à deux pas du Grand Palais Éphémère. C’est un petit lieu intimiste de 10 m2, aux murs grèges. Je voulais éviter la galerie blanche et froide. Mon souhait est que les visiteurs se sentent chez eux et puissent apprécier des œuvres à taille humaine. J’ai choisi d’axer ma programmation sur la peinture. Je défends la sensibilité et la beauté, des notions qui peuvent apparaître désuètes. À une époque où l’on met beaucoup en avant les jeunes artistes, j’expose des artistes plus matures, qui montrent une production de qualité cohérente dans le temps. Mais je ne m’interdis pas de sélectionner de jeunes artistes si leur œuvre me séduit.

Comment choisissez-vous les artistes que vous exposez ?

Beaucoup de personnes me demandent où je trouve mes artistes. Et bien, je les cherche et je les vois ! Aujourd’hui, cette quête passe beaucoup par les réseaux sociaux. On ne peut pas se passer d’Instagram quand on est artiste. Je regarde leur compte, l’appréciation des autres créateurs sur leur travail (combien ont-ils de likes, qui les a likés ?) Pour sélectionner un artiste, il faut que je sois émue, admirative. Il faut que son travail enrichisse mon offre, tout en restant dans ma ligne. Au fur et à mesure des expositions, j’ai remarqué que j’aime les œuvres où la couleur est structurante, sans être forcément prépondérante.

Ensuite, il s’agit d’une question de rencontre. La relation artiste-galerie est une alchimie. Il faut avoir envie de construire une aventure commune. C’est aussi une question de confiance. Rien ne me hérisse plus qu’un artiste qui me demande quelles sont mes conditions pour exposer. Je ne suis pas une loueuse de cimaises. La relation humaine est primordiale.

Préférez-vous découvrir vous-même les artistes ? Répondez-vous aux demandes de contact ?

Un galeriste est très heureux quand il découvre lui-même un nouveau talent. Mais quand un artiste me contacte, je regarde toujours son travail et je prends la peine de répondre. Parfois, je donne des pistes de lieux d’exposition. Pour nous galeristes, il est important de ne pas couper les ponts avec la génération montante. Cependant, tout dépend de la façon dont l’artiste aborde le galeriste. Certains envahissent ma messagerie de dizaines et dizaines de photos sans un mot d’explication. Là, je ne réponds pas.

C’est vrai qu’il est compliqué d’obtenir un rendez-vous, mais quand l’artiste a un site internet bien fait, un compte Instagram à jour et professionnel, je ne lui claque pas la porte au nez. Je suis aussi sensible aux personnes qui me sollicitent non pas pour exposer, mais pour avoir mon œil de professionnel.

Comment définiriez-vous les relations artistes-galeristes ?

Artiste et galeriste sont deux métiers (deux vocations, en fait) très durs. Leur relation est construite sur un mode d’affinité élective. L’artiste doit se demander s’il a envie de faire partie de l’équipe. Il doit s’intéresser aux choix de la galerie. Si l’on sent que la relation est forcée d’un côté ou de l’autre, cela ne marchera pas.

Bien sûr, il faut parler d’argent, mais la relation artiste-galeriste c’est d’abord une relation personnelle, où tous les deux parlent d’art. Or parler d’art est aujourd’hui très rare dans nos sociétés, malgré l’importance paradoxale de l’art comme valeur spéculative majeure. Nous sommes tous les deux, artiste et galeriste, co-créateurs d’exposition. Je suis toutefois décisionnaire de l’accrochage et de la sélection. La galerie est mon espace, je vais vivre avec les œuvres plusieurs semaines. Pour pouvoir bien les défendre, je dois me sentir bien.

Je ne me considère pas comme un coach, car avec l’artiste, nous marchons ensemble. C’est une relation de partage. En discutant sur son art, en sélectionnant ses œuvres, j’aide l’artiste à développer des réflexions, je peux redonner une cohérence à son parcours.

Avec l’essor des galeries en ligne, des réseaux sociaux, nombreux sont ceux qui prédisent le déclin des galeries physiques, qu’en pensez-vous ?

Je ne le vois pas comme ça. Les galeries en ligne ne sont pas véritablement des galeries, car elles n’entretiennent pas de relations avec les artistes. Ce sont juste des plateformes de vente. Les galeries d’art ne disparaîtront pas. Aujourd’hui, beaucoup d’artistes se sentent seuls. La galerie leur offre un accompagnement personnalisé, elle leur permet de faire partie d’une communauté de créateurs. La galerie les crédibilise en leur offrant une reconnaissance sur la qualité de leur travail. Du côté des collectionneurs, si avec la crise du Covid, ils ont davantage acheté sur internet, ils se sont aussi aperçus de l’importance du conseil du galeriste, de son œil artistique. De plus, quand ils acquièrent une œuvre, ils veulent également partager un moment autour de l’art ! Cet échange, ils ne le trouveront qu’en galerie.


5 erreurs à ne pas commettre
quand on démarche une galerie

  • Débarquer avec son book sans rendez-vous
  • Solliciter la galerie pendant une foire, un salon (ce n’est pas du tout le bon moment).
  • Ne pas se préoccuper des choix éditoriaux de la galerie (proposer de la peinture dans une galerie spécialisée photo).
  • Lui communiquer un compte Instagram mélangeant vie pro et vie perso.
  • Balancer des e-mails ou des messages privés sur les réseaux sans prendre le soin de se présenter et d’expliquer pourquoi on la contacte


idee, lampe, picto

Pour aller plus loin…

Si vous souhaitez exposer en galeries, j’ai créé un cours vidéo hyper-pratique qui vous aidera à comprendre et à intégrer ce monde très fermé des galeries d’art. Il vous donnera toutes les clés pour réussir et éviter des erreurs fatales !

Pour découvrir le programme de ce cours, il suffit de cliquer ici : Objectif : j’expose en galeries


L’AUTEURE

Valérie Auriel

Artiste peintre et journaliste, Valérie est une grande curieuse, assez perfectionniste (limite maniaque 😉 ). Elle met en synergie ses deux expériences professionnelles pour débroussailler la jungle administrative des métiers des arts visuels, explorer leurs coulisses. Et elle partage avec vous ses connaissances pour que vous exerciez votre art en toute sérénité !



Commentaires

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Êtes-vous déjà représenté par une galerie ? Cherchez-vous à y exposer ? Quelles sont les relations que vous entretenez avec vos galeristes ? Pensez-vous que les galeries d’art seront remplacées par les galeries en ligne ? Dites-nous vos bonnes et moins bonnes expériences en commentaire !

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CHIQUET Martina

Un panorama intéressant et complet sur les galeries.
Merci Valérie!

Adeline Metro

Cet article décrit très bien le profil des différentes galeries et les pièges dans lesquels il ne faut pas tomber, et j’ai bien aimé l’interview avec Cécile Dufay, qui est très complet.
Merci
Adeline Metro

Dellis

Bonjour Valérie,

J’aime beaucoup lire le contenu de votre newsletter, toujours très intéressant, bien écrit et surtout facile à lire.

Votre article m’interpelle.
En effet, ill m’a été suggéré quelques fois d’exposer mes productions mais j’ai le sentiment qu’elles n’auraient pas leur place dans une galerie d’art.

Je vous explique: depuis quelques mois, je propose a des médecins, chirurgiens en particulier de les dessiner en plein travail afin d’illustrer leur cabinet médical, site internet et autres réseaux sociaux.
Je travaille aux crayons graphites puis je numérise mon travail afin de traiter mon image avant de la faire imprimer sur papier qualité fine art.
Parfois je les « colorise » mes dessins.

Les encres utilisées sont de grande qualité et le rendu assez particulier.

Je me demande dans quelle mesure mon travail pourrait intéresser le grand public et, a fortiori un(e) galeriste.

Pourriez-vous me donner votre sentiment à ce sujet s’il vous plaît?

Bien à vous

AnSo

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