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Comment créer un parcours d’artistes ?

L’expérience réussie d’Hélium en Vallée de Chevreuse

Il y a dix-sept ans, l’association d’artistes Hélium créait un parcours d’ateliers portes ouvertes dans la Vallée de Chevreuse et ses environs. Près de 100 artistes y participent désormais et la renommée de l’événement dépasse les frontières de son territoire. Fabienne Nuyttens-Perin, artiste peintre et vice-présidente, nous explique les coulisses de cette manifestation

Le Guide de l’Artiste : Comment est né Hélium ?

Fabienne Nuyttens-Perin : Hélium a été lancée en 2004 à l’initiative de quelques artistes qui habitaient dans des petites communes des Yvelines. Ils se sentaient isolés au niveau de la création, de la communication. Ils ont eu l’idée de lancer une association pour mieux se connaître et profiter d’un même élan créatif. Très vite, ils ont organisé un parcours pour faire venir le public dans les ateliers. Au début, l’événement était concentré autour du village de Bonnelles dans les Yvelines. Petit à petit, il s’est étendu vers Saint-Rémy-lès-Chevreuse, puis sur d’autres communes, il a débordé sur l’Essonne. Le Parc naturel de la Haute Vallée de Chevreuse est ensuite devenu notre partenaire.

Le nom de notre association est plutôt original. Il évoque une idée de légèreté, d’ascension. Il ne se prend pas au sérieux, et amène un peu d’humour. Ce mot nous va bien, je trouve.

Aujourd’hui, quel est l’ampleur du parcours ?

Cette année, c’est notre 17e parcours d’artistes. Cet événement a pris une belle envergure. 97 artistes exposent en 2021, répartis sur 37 communes des Yvelines et de l’Essonne. Nous réunissons chaque année une centaine de participants, car le parcours est un peu le rendez-vous annuel des artistes de notre région.

Quelles sont vos conditions de participation ?

Pour participer, il faut être adhérent à Hélium ou être invité par un adhérent de l’association. Nous sommes assez sélectifs quant aux nouvelles adhésions car nous commençons à être nombreux. Le premier critère est bien sûr d’avoir son atelier dans la Vallée de Chevreuse ou ses environs. Nous demandons aux candidats de nous envoyer un petit dossier sur leur parcours, leurs œuvres. Ils joignent une lettre de motivation pour expliquer comment ils souhaitent s’engager au sein de l’association. Ce n’est pas tout de vouloir participer aux portes ouvertes, nous recherchons des personnes actives prêtes à s’impliquer un minimum, qui donnent de leur temps et s’investissent en fonction des événements. Les organisateurs ne doivent pas être toujours les mêmes !

Nous sélectionnons les candidats en évitant les critères subjectifs. Nous voulons montrer un échantillon représentatif de la création de notre région. Nous regardons d’abord la cohérence du travail, le parcours, la motivation. Nous privilégions aussi les dossiers dont les œuvres se démarquent de celles des artistes déjà dans le collectif. Toutes ces conditions font que nous ne prenons que quelques nouvelles personnes par an.

Nous acceptons que les adhérents invitent d’autres artistes dans leur atelier lors du Parcours d’artistes. C’est souvent plus convivial d’exposer à deux. Inviter un artiste permet de proposer de la nouveauté au public et de créer de l’attractivité. 

Comment expliquez-vous le succès de votre association ?

Nous avons constitué une équipe dynamique autour de Cécile Dachary, notre présidente archivolontaire, archiproductive qui nous entraîne dans son élan. Chaque année, nous gagnons en renommée, les institutions nous connaissent mieux et nous soutiennent, le public répond présent. Cette réussite fait boule de neige. Notre parcours est devenu un temps fort artistique en Vallée de Chevreuse.

Nous ne nous arrêtons pas aux ateliers portes ouvertes, nous avons créé des événements annexes qui permettent de réunir les artistes, de créer du lien entre nous et ajoutent à notre visibilité. Nous organisons tous les deux ans une exposition collective ouverte à tous nos membres, qui a lieu à chaque fois dans une ville différente. Également tous les deux ans en alternance, nous montons une exposition plus sélective à la Chapelle de Clairefontaine. Nous y présentons des œuvres plus inhabituelles, de plus grand format. Pour cet événement, un jury sélectionne les candidatures.

Cet été, nous avons aussi proposé une balade artistique en forêt sur trois communes, avec une quarantaine d’œuvres reproduites sur bâches et une vingtaine d’installations. Cette exposition en plein air nous a beaucoup sollicité, mais a eu un bel écho auprès du public et a apporté une respiration aux artistes en mal d’exposition ces derniers temps.

Comment est organisée votre équipe ?

L’équipe de direction actuelle est en place depuis quatre ou cinq ans. Nous nous réunissons tous les mois pour discuter des projets en cours, des actions à entreprendre. Depuis 2 ou 3 ans, des membres plus récents insufflent une nouvelle dynamique, ils nous remplacent même parfois sur les événements. Cette aide est nécessaire pour ne pas se lasser. Organiser des portes ouvertes annuelles demande en effet beaucoup de travail. Nous nous sommes répartis les différentes tâches et nous avons créé des commissions. Moi par exemple, je m’occupe de la communication, je suis assistée par des artistes référents communication dans chaque commune.

Depuis deux ans, nous faisons appel à une graphiste extérieure pour la conception des visuels. Des membres de l’association s’occupent du site internet, de la page Facebook, de notre compte Instagram, d’autres font de la relecture… Chacun agit selon ses choix, ses compétences, sa disponibilité. Pour les expositions, nous avons toujours des volontaires, car nous essayons de monter des événements de bonne tenue. Cette ambition est motivante pour les adhérents, qui ont envie de participer.

Comment vous organisez-vous pour le Parcours d’art ?

Chaque année, nous planifions les journées portes ouvertes les deux premiers week-ends d’octobre. Auparavant, le parcours avait lieu en novembre, mais cette programmation était trop tardive dans la saison, la nuit tombe plus tôt et il commence à faire froid. Les artistes nous envoient leur inscription avant le 31 mars, avec leurs coordonnées et une photo de format carré pour la brochure.

La brochure, c’est la clef de la communication. Nous sommes persuadés que c’est surtout ce document qui incite les visiteurs à se déplacer. Le public ne peut pas tout voir. L’idéal est qu’il prenne connaissance du programme quelques jours avant. Il peut tranquillement regarder ce qui lui fait envie, se documenter en allant sur les sites internet des artistes. Il peut établir son propre parcours en fonction de la localisation des ateliers…

D’un point de vue pratique, c’est un fascicule broché de 24 pages, format A5, édité à 15 000 exemplaires. Il liste les artistes lieu par lieu, avec une photo et leur adresse. En fin de plaquette, nous indiquons les horaires des différentes animations et performances proposées par les ateliers, les sites internet et téléphones. Nous avons aussi une carte qui présente la localisation des ateliers et une page donnant des idées de randonnées.

Nous imprimons également des affiches, environ 2000 exemplaires (de format A1 à A4), une quarantaine de banderoles à accrocher dans les villes, des grands logos que nous posons sur les façades de nos lieux collectifs. Nous fabriquons des flèches signalétiques qui servent à localiser les ateliers. C’est un repère visuel fort qui rappelle aux amateurs d’art la venue de l’événement.

Nous donnons rendez-vous aux artistes pour qu’ils viennent chercher ces éléments de communication. Je leur demande de distribuer les brochures une quinzaine de jours avant l’événement, et de toujours le faire à bon escient en les déposant dans des lieux culturels ou de loisirs et dans les commerces de proximité à forte fréquentation.

La brochure éditée à 15 000 exemplaires, élément clef de la communication

Quelles sont vos autres actions de communication pour faire connaître l’événement ?

Nous payons de la publicité dans les magazines Artension et Télérama Sortir. J’envoie aussi des communiqués en ciblant la presse locale et les magazines artistiques. L’année dernière nous avons eu la chance d’avoir un article de fond dans Télérama Sortir. Celui-ci a eu un bel impact : des personnes sont venues de Paris nous visiter grâce à cette parution.

Nous disposons aussi d’une page Facebook, d’un compte Instagram, d’un site internet qui est très régulièrement consulté, notamment en période d’événements. Ces postes sont gérés par des artistes différents.

Des communes nous apportent une aide financière, avec des subventions pour le parcours, les manifestations ponctuelles. Certaines nous prêtent également des salles pour exposer les artistes qui n’ont pas la possibilité d’accueillir du public dans leur atelier.

Après les portes ouvertes, nous envoyons aux exposants un petit questionnaire par mail. Nous leur demandons combien de visiteurs ils ont accueillis, s’ils ont vendu, s’ils sont satisfaits de l’événement, de l’organisation, ce qu’ils aimeraient voir s’améliorer. La fréquentation est un élément de communication significatif que nous mettons en avant auprès de la presse et des élus pour quantifier l’impact de ces journées.

Communiquer sur un parcours n’est pas simple, car il y a une cinquantaine d’adresses qui doit en bénéficier. L’événement doit être bien relayé dans chaque commune. Il faut que tout le monde joue le jeu et communique au maximum.

Pendant le parcours, des expositions ont lieu dans des espaces partenaires : ici l’Espace Guy Jean-Baptiste Target aux Molières accueille Klasien Boulloud, Sunhee Lee et Bernard Sustrac (parcours 2020)

Quels conseils pourriez-vous donner à des artistes qui souhaitent créer leur parcours d’art ?

Pour qu’une association fonctionne bien, il faut avoir la même vision des choses. Quand on organise un événement, il faut le penser pour le public et non pour soi, le rendre accessible et attractif pour le plus grand nombre… Il faut aussi avoir bien conscience que l’organisation de portes ouvertes va demander beaucoup de temps et d’énergie. Pensez collectif, soyez dans la bonne humeur ! Il faut savoir mutualiser les motivations, les forces en étant souple et conciliant.

Mais si nous donnons beaucoup de nous-mêmes, nous recevons aussi beaucoup du public et du collectif ! L’intérêt d’une association c’est de se réunir autour d’un bel objectif, d’une belle idée. Grâce à l’association, nous sortons de notre isolement, nous nous rapprochons d’autres artistes. Ces échanges permettent ainsi d’impulser de nombreux autres projets…


Les 4 clefs du succès

  • Une équipe dirigeante soudée
  • Des adhérents sélectionnés notamment sur leur implication
  • Une brochure qualitative
  • Des expositions en dehors des portes ouvertes pour créer du lien entre artistes


Quelques chiffres

Cotisation à l’association : 35 €
Participation au Parcours d’artistes : 50 €
97 artistes exposant sur 37 communes en 2021
118 adhérents en 2021 (tous ne participent pas au Parcours)
En 2020 : 15 500 visites sur 59 adresses
Budget du parcours d’art : entre 8 500 et 9 000 €

Parole d’artiste
Hélène Courvoisier, photographe

« Les portes ouvertes, un moment privilégié »

En octobre 2021, j’exposerai au Parcours d’artistes d’Hélium pour la seconde fois, en tant qu’artiste. Je connais l’association Hélium depuis une dizaine d’années. En tant que public, à chaque édition du Parcours, c’est un vrai bonheur de découvrir la richesse de production de ses membres. Il est aussi très agréable de pouvoir discuter avec les artistes pendant ce moment privilégié des portes ouvertes.

J’ai souhaité participer au Parcours, car depuis quatre ou cinq ans, je développe ma propre démarche en tant que photographe. Je voulais donner de la visibilité à mon travail. J’ai eu la chance et l’honneur d’être acceptée dans ce collectif. Ma seule frustration est qu’en participant moi-même au parcours, je ne peux plus visiter les ateliers comme je le faisais avant ! J’ai, par contre, énormément apprécié de rencontrer le public. L’année dernière, les deux week-ends des portes ouvertes furent des moments très enrichissants et agréables.

Le collectif est très important pour moi

Comme je n’ai pas d’atelier, l’association m’a proposé d’exposer dans une chapelle avec deux autres artistes. Je connaissais le travail de l’une d’elle, mais pas la deuxième. Nous avons visité l’espace quelques mois avant les portes ouvertes. Le lieu était totalement à investir, car il n’y avait pas de système d’accrochage et peu de lumière. Hélium nous a prêté du matériel. Les deux autres artistes et moi avons ensemble réfléchi à la meilleure façon de mettre en valeur nos univers. Cela a été une aventure passionnante avec de très beaux échanges entre nous trois. Cette année, j’expose dans une église avec un autre peintre. Le principe de l’association est de faire tourner les artistes dans les lieux collectifs du parcours, pour que les expositions changent chaque année.

Après les portes ouvertes, j’ai participé cet été à la balade artistique dans la forêt organisée par Hélium. J’ai beaucoup apprécié. Ces expositions collectives permettent de se rencontrer entre artistes, de mieux nous connaître. L’aspect collectif est très important pour moi, j’apprécie que l’association nous propose régulièrement de tels projets. Pour progresser dans sa création, il faut échanger avec d’autres artistes, partager des projets communs, se nourrir d’autres expériences artistiques… »

Photos de l’article : Hélium association, Hélène Courvoisier

Prochaine édition du Parcours d’artistes

  • Rendez-vous les week-ends du 2-3 octobre, et du 9-10 octobre 2021, de 11 heures à 19 heures pour découvrir les artistes participants et apprécier cette belle énergie du collectif et de chacun des membres !
  • Renseignements et plaquette à télécharger sur le site internet de l’association Hélium

Commentaires

Participez-vous à un parcours d’artistes ?

Dans votre ville, dans votre région existe-t-il des parcours d’ateliers portes ouvertes ? Y participez-vous ? Le public est-il au rendez-vous (et les acheteurs) ? Aimeriez-vous monter votre propre parcours ?

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L’AUTEURE

Valérie Auriel

Artiste peintre et journaliste, Valérie est une grande curieuse, assez perfectionniste (limite maniaque 😉 ). Elle met en synergie ses deux expériences professionnelles pour débroussailler la jungle administrative des métiers des arts visuels, explorer leurs coulisses. Et elle partage avec vous ses connaissances pour que vous exerciez votre art en toute sérénité !

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Sylvie Loudieres

Beau reportage, bravo pour votre travail.
Créer un collectif est une vrai solution effectivement, ma difficulté est, que je suis sur un territoire géographique peu peuplé d’artistes. La proximité géographique est en fait aussi importante. Bonne continuation.

Sustrac Bernard

Bel article .
Je fait parti de ce groupe d’artistes et je peux témoigner que son dynamisme m’aide beaucoup dans ma démarche artistique et dans ma rencontre avec le public.

Vincent Gabin

Beau boulot d’écriture ! Et belle initiative de cette association.
A bientôt au 100.

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